Les milliers de sinistrés qui ont de l’eau jusqu’aux cuisses se retrouvent devant un vrai casse-tête. En plus d’avoir à sauver leur maison, ils doivent résoudre toutes sortes de petites colles financières. Voici des réponses à certaines questions fréquentes.
POURQUOI FAUT-IL APPELER SON ASSUREUR MÊME SI ON N’EST PAS COUVERT ?
Comme je vous le disais hier, les assureurs n’offraient aucune protection contre les inondations jusqu’à tout récemment. Mais cela ne veut pas dire que les assurés n’ont droit à rien.
Lorsqu’un propriétaire reçoit un ordre d’évacuation de son domicile, les polices d’assurance « tous risques » prévoient une indemnité pour les frais de logement et de subsistance, même si l’assuré n’est pas couvert pour les dommages causés par l’inondation en tant que telle. Les frais de subsistance sont généralement pris en charge pour une période limitée à 15 ou 30 jours.
Cette clause permet aux sinistrés d’être mieux relogés qu’avec le programme d’aide gouvernementale, qui verse à peine 20 $ par jour pour chaque personne évacuée, et seulement à partir du quatrième jour.
Les sinistrés qui n’ont pas reçu un avis d’éviction officiel devraient aussi avoir droit au remboursement de leurs frais de subsistance, estime Jean-Guy Bergeron, spécialiste du droit des assurances et professeur émérite à l’Université de Sherbrooke.
« À mon avis, quand quelqu’un suit le conseil des autorités qui lui enjoignent de quitter sa maison pour des raisons de sécurité, ça fait office d’avis d’éviction », dit-il. Mais le sujet reste matière à débat…
Cet enjeu a d’ailleurs été au cœur du recours collectif intenté à la suite de la crise du verglas : 19 assureurs ont finalement dû verser 52,5 millions à quelque 2,5 millions de personnes… 16 ans après la catastrophe. Espérons qu’on ne soit pas obligé d’en arriver là, cette fois-ci.
Quoi qu’il en soit, il est important de passer un coup de fil à votre assureur pour vérifier les protections dont vous disposez. N’oubliez pas de conserver toutes vos factures pour justifier vos dépenses.
Pour en savoir plus sur le processus de réclamation, vous pouvez consulter le Guide d’accompagnement du sinistré de la Chambre de l’assurance de dommages (ChAD).
POURQUOI LES COPROPRIÉTAIRES SONT-ILS MIEUX PROTÉGÉS ?
Le monde de l’assurance est truffé d’incohérences. En voici un exemple de plus. Les propriétaires de maisons unifamiliales ne sont pas couverts pour les inondations. Mais les commerces et les copropriétés, oui.
En fait, une grande majorité de copropriétaires sont effectivement couverts par un avenant à leur police d’assurance qui les protège contre les inondations, voire les tremblements de terre.
Vous me direz que les risques d’être inondés sont assez faibles quand on vit tout en haut d’une tour d’habitation. Vrai. Mais pensez au stationnement, au hall d’entrée et à ceux qui demeurent au rez-de-chaussée.
Tout ça est couvert, car l’avenant couvre tant les parties privatives que les parties communes, précise Yves Joli-Cœur, avocat émérite et secrétaire général du Regroupement des gestionnaires et copropriétaires du Québec (RGCQ).
LES LOCATAIRES SINISTRÉS DOIVENT-ILS PAYER LEUR LOYER ?
Le locataire dont le logement a été inondé n’est pas obligé de payer son loyer durant la période où son logement est impropre à l’habitation.
Mais pour avoir droit à cette « pause », le locataire doit aviser son propriétaire avant l’abandon du logement ou dans les 10 jours qui suivent, explique le Barreau du Québec dans un guide spécial publié au début de la semaine et qui fait un bon tour des enjeux juridiques touchant les inondations au Québec.
Dès que le logement redevient propre à l’habitation, le locateur est tenu d’en aviser le locataire, si ce dernier lui a laissé sa nouvelle adresse. Le locataire dispose ensuite de 10 jours pour confirmer à son propriétaire s’il reviendra ou non dans son ancien logement.
Mais si le locataire passe tout droit ou s’il est carrément parti sans donner d’adresse à son propriétaire, celui-ci peut déchirer le bail et louer l’appartement à quelqu’un d’autre. Soyez vigilants !
LES GENS DOIVENT-ILS PAYER LEURS TAXES MUNICIPALES QUAND MÊME ?
Pour les sinistrés, c’est une double gifle. Même si leur assureur ne les couvre pas, même si le gouvernement ne leur verse qu’une indemnisation partielle, même si la valeur de leur maison a baissé, ils devront payer leur impôt foncier fondé sur la pleine valeur de leur résidence.
À la Ville de Montréal, on m’a répondu qu’en vertu de l’article 481 de la Loi sur les cités et villes, « il n’est pas au pouvoir du conseil ou des fonctionnaires ou employés de la municipalité de faire remise des taxes ni des intérêts sur ces taxes ».
Donc, pas question de réduire la facture.
Toutefois, la Ville de Montréal reste très sensible à la situation des sinistrés. « Nous sommes actuellement à évaluer les différentes options et solutions qui s’offrent à nous afin que nous puissions soutenir les citoyens affectés par les crues printanières. Une décision à ce sujet sera prise rapidement », m’a-t-on assuré.
Certaines villes ont déjà annoncé que les sinistrés auraient plus de temps pour envoyer leur chèque. C’est le cas d’Ottawa, où le maire propose de reporter la date limite pour le paiement des taxes municipales au 7 décembre prochain pour les résidants touchés par la crue des eaux, comme le rapportaient mes collègues du Droit.
Espérons que toutes les municipalités auront la même politesse.
Les contribuables qui ont les deux pieds dans l’eau peuvent se prévaloir de délais additionnels pour leurs impôts et leurs taxes à l’Agence du revenu du Canada (ARC). Revenu Québec a aussi annoncé qu’il donnerait un répit aux sinistrés.
Source : Stéphanie Grammond, LA PRESSE
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