Depuis plusieurs années, Françoise Bettencourt-Meyers soutient activement l'Institut francilien d'implantation cochléaire (Ific), qui, sous l'autorité du Pr Bruno Frachet, travaille à développer une chirurgie novatrice au service des sourds. La surdité souffre, selon elle, d'un manque d'écho qui contribue à enfermer les malentendants dans des souffrances silencieuses. Elle présentait hier son livre de témoignages, Ensemble prêtons l'oreille, Expériences de surdités(1), au Festival du livre de Nice.
Pourquoi avez-vous décidé de mener ce combat contre la surdité ?
« J'ai eu la chance d'approcher beaucoup de personnes implantées. Elles m'ont raconté leurs souffrances passées. La surdité est un mal invisible, même pour les proches. L'illusion est permanente… Pour beaucoup de Français, le handicap auditif reste un tabou ; on ose dire qu'on voit mal, mais on hésite à confier que l'on est sourd comme un pot. »
Pourquoi un tel tabou ?
« L'image très ancrée dans les esprits de grands-parents portant un cornet acoustique ne facilite certainement pas les choses… »
Quid du dépistage ?
« Il reste insuffisant, et c'est très préjudiciable. La malentandance est l'antichambre de la surdité ; pour éviter cette issue, il faut la prendre en charge précocement. Et c'est ce que permet le dépistage. En composant un simple numéro de téléphone (0.892.790.791), on peut avoir, en moins de quatre minutes, un diagnostic. »
Existe-t-il d'autres freins à la réhabilitation auditive ?
« Oui. Et ils sont nombreux. Il y a le manque de connaissance de son handicap, avec des symptômes qui arrivent sournoisement. Il y a aussi la peur du diagnostic, comme pour toutes les maladies. Il y a surtout le coût, bien trop élevé (1 700 € en moyenne pour une prothèse auditive) pour une majorité de Français, et très mal pris en charge par l'Assurance-maladie. Résultats : 5 millions de malentendants, parmi les 7,6 millions recensés, ne sont pas appareillés. Avec le risque bien identifié de perte d'autonomie, d'isolement, de dépression, de perte d'emploi même… Des personnes se sont ainsi fait licencier parce qu'elles n'entendaient rien ! »
Certaines personnes atteintes de surdité défendent une véritable culture des sourds et s'opposent à une implantation précoce des enfants sourds.
« Je peux le comprendre. La langue des signes est une très belle langue, qu'il faut protéger et conserver. Lorsqu'un enfant sourd naît dans une famille malentendante, il me semble normal qu'elle souhaite l'ouvrir à la langue des signes. Mais 95 % des enfants sourds naissent dans des familles entendantes. Et celles-ci doivent être informées de toutes les solutions disponibles pour que leur enfant vive au mieux son handicap. L'implant cochléaire a représenté, de ce point de vue, une véritable révolution. Mais il est important que l'enfant puisse en bénéficier très tôt, vers l'âge de 18 mois. »
Un mot sur la prévention ?
« Il faudrait mieux sensibiliser les jeunes aux risques auxquels ils s'exposent, via l'utilisation intensive des baladeurs en particulier. Savent-ils seulement que le seul remède à la déficience auditive liée au baladeur, c'est la prothèse ? Quand on est jeune, il est difficile de faire attention à tout… Mais davantage de recommandations serait utile. »
1. Disponible au Festival du livre. Les bénéfices sont reversés à l'Institut francilien d'implantation cochléaire (Ific).
SOURCE : http://www.corsematin.com/article/papier/francoise-bettencourt-meye...
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