Flying Words Project: la poésie au-delà du langage

La foule était en liesse (silencieuse), vendredi soir, à la Sala Rossa, attendant avec impatience l’arrivée sur scène de Peter Cook et Kenny Lerner pour le Flying Words Project: un curieux spectacle de poésie en langage des signes.

L’art de performance s’avère un créneau particulièrement difficile à accommoder pour qui n’entend pas, mais, cette fois-ci, la communauté non-entendante semblait s’être réunie pour l’évènement. L’ambiance de la salle était fascinante, des conversations en American Sign Langage (ASL) côtoyaient d’autres en Langage des signes du Québec (LSQ), avec une cohabitation entre anglophones et francophones. Le spectacle avait commencé bien avant l’entrée sur scène des performeurs : une véritable pièce de théâtre multilingue se déroulait chez les spectateurs.

Cette multitude de langages en superposition s’est poursuivi tout le long de la performance. Peter Cook déclamait sa poésie en ASL, Kenny Lerner complétait les images avec de l’anglais(ce fut d’ailleurs son seul apport au spectacle), une projection du texte en français tenait lieu de sous-titres, et une interprète traduisait la performance en LSQ. Cependant, ces traductions se sont avérées rapidement obsolètes, car le langage de Peter Cook transcendait les barrières de langues.

Sa performance se trouvait à la frontière entre le mime et la poésie, combinant habilement performance physique et imagerie poétique. Son corps était complètement dévoué à ses textes, et il s’est complètement offert à son public. Chaque mouvement était flamboyant, précis, joué avec émotion. Son visage créait à lui seul une galerie de personnages cocasses et émouvants, du joueur de baseball à la mère tenant son nouveau-né. Nul besoin de mots pour évoquer la superposition d’images créant des tableaux poétiques.

La thématique des poèmes devenait plutôt répétitive vers la fin, mais restait néanmoins toujours émouvante. La neige, la pluie, l’enfance, l’amour, l’évolution, les problèmes environnementaux et les questions d’injustice sociale constituaient la majeure partie de son univers. Le poème sur l’amour et l’enfantement fut un moment particulièrement touchant du spectacle. Bien entendu, je n’oserai ici traduire en mots ce qui fut dit en gestes relatant le coup de foudre d’un homme jusqu’à l’accouchement de son enfant.

Bien entendu, pour qui ne comprend pas l’ASL, certaines trouvailles linguistiques ou jeux de mots passaient inaperçus. Le processus de transformation d’un mot en devenant un autre s’avérait difficile à identifier. C’est d’ailleurs ce qui pourrait en déranger certains. Selon plusieurs, la poésie n’est pas que la création d’une image après tout, mais est aussi rimes, rythme et sons.

Peter Cook pose donc une question de réflexion intéressante à travers sa performance et revient à nous questionner sur le sens même d’un poème.

SOURCE : http://www.pieuvre.ca/2012/10/22/culturel-flying-words-project/

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