Christine Petit, généticienne à l'Institut Pasteur, est professeure au Collège de France. Pionnière, elle a découvert les gènes de la surdité héréditaire. Et prépare des thérapies géniques...
Un nez de petite-fille de vignerons des grands crus Chassagne-Montrachet. Une oreille musicale. Un rêve de médecine. Le parrainage d'un prix Nobel, François Jacob. Mixez le tout. Ajoutez une pincée de fort caractère, une belle joie de vivre et vous découvrez Christine Petit.
À l'origine, elle se destine à la médecine. Un lointain grand-père était médecin de campagne. Mais elle aime chercher le pourquoi des phénomènes biologiques. Elle complète alors par la fac des sciences d'Orsay. Coup de foudre pour la recherche. « Que du plaisir. »
Elle prépare donc une thèse en immunologie à l'Institut Pasteur. « En fait, c'était une impasse. » Elle se rebelle - « c'est allé très loin » - prend le contre-pied de son directeur de thèse alors qu'elle attend son premier enfant. « J'ai eu beaucoup de chance », dit-elle. Sa carrière aurait pu s'interrompre, mais l'institut ne lui ferme pas ses portes, bien au contraire. Elle change de voie et se passionne pour la génétique aux côtés de Jean Weissenbach. C'est l'époque pionnière du décryptage du génome humain.
Des recherches dans des villages isolés
Elle s'intéresse d'abord à l'olfaction à travers le syndrome de Kallmann. Une maladie rare qui associe une absence d'odorat et de développement de la puberté. Puis elle passe en revue les systèmes sensoriels, les atteintes héréditaires. S'arrête sur l'audition, si importante. « Claude Lévi-Strauss, à la fin de sa vie, disait préférer perdre la vue que l'ouïe. C'est l'oreille, d'abord, qui nous met en relation avec les autres. » Jusqu'alors, elle était l'affaire des physiciens, des spécialistes du son. Mais des gènes et des molécules impliquées, on ne savait rien.
Comment localiser les gènes défectueux ? En France et dans tous les pays développés, les malentendants s'unissent souvent entre eux. « On ne pouvait pas tracer la transmission. » Elle a l'idée géniale de se tourner vers des villages isolés du pourtour de la Méditerranée. Aux portes de son bureau, on découvre ainsi une petite photo jaunie, au-dessus d'un arbre généalogique, celle d'une famille du nord de la Tunisie. « Elle nous a permis de localiser le premier gène de la surdité héréditaire congénitale, en 1993. »
La quête s'est poursuivie en Iran, en Jordanie, au Liban. Aujourd'hui, le laboratoire de Christine Petit, à l'Institut Pasteur, a identifié plus de vingt gènes associés à des déficits auditifs profonds. « On sait désormais que la plupart des atteintes congénitales sévères sont héréditaires. »
Son équipe, devenue multidisciplinaire et paritaire - égalité homme femme, elle y tient - a travaillé sur le syndrome d'Usher : la surdité congénitale se double d'une cécité progressive. Pour les familles, le diagnostic est primordial. Elle y travaille avec l'Institut de la vision. Elle prépare les premières thérapies géniques, explore la presbyacousie (la surdité due à l'âge). Elle a 64 ans et encore des dizaines de combats à mener à bien.
© 2024 Créé par Francosourd. Sponsorisé par
Vous devez être membre de Francosourd pour ajouter des commentaires !
Rejoindre Francosourd